Accouchement - Enfant - Atteinte neuromotrice  - Gynécologue - Responsabilité

13/06/2021

Mme C., âgée de 35 ans, a été suivie dans le cadre de sa troisième grossesse et à compter de la douzième semaine d'aménorrhée par le docteur V., gynécologue obstétricien.

Le 6 septembre 2004 à 1h40, elle a été hospitalisée à la clinique de l'Anjou en raison d'une rupture prématurée des membranes. Elle a été placée sous la surveillance d'une sage-femme. Entre 13h15 et 13h25, ont été constatées des anomalies du rythme cardiaque foetal (RCF) lequel s'est normalisé jusqu'à 13h42. A ce moment là, des ralentissements majeurs du RCF ont conduit la sage-femme à appeler le docteur V. qui est arrivé sur place à 13h50.

Il a fait procéder à un accouchement par voie basse avec ventouse d'expulsion, Marie est née à 14h17, en état de mort apparente et a été transférée en soins intensifs de néonatalogie.

En raison d'une atteinte neuro-motrice, elle subit un handicap très important.

Sur la responsabilité du gynécologue obstétricien

Le tribunal a retenu que les experts V. et B. avaient rappelé que le docteur V était arrivé en salle d'accouchement, à 13 heures 52, qu'il y avait des anomalies du RCF majeures depuis environ 7 minutes qui ont perduré pendant 25 minutes.

Le tribunal a jugé qu'à son arrivée, le docteur V. aurait dû tenir compte de ce que Mme C. présentait un utérus cicatriciel, que depuis 13h45 il y avait des anomalies du RCF avec des ralentissements profonds rapprochés, une bradycardie pendant 3 minutes et que la présentation de l'enfant était céphalique, entre partie moyenne et partie basse, donc avec un foetus qui était facilement extractible rapidement par un forceps.

Le tribunal, à la suite des deux collèges d'experts, a retenu qu'un forceps rapide aurait permis d'extraire l'enfant vers 13h55, évitant ainsi 22 minutes de souffrance foetale supplémentaire.

Les premiers juges ont observé que ce manquement dans la prise en charge de Mme C. avait eu pour conséquence pour l'enfant une souffrance anoxo-ischémique pendant la phase d'expulsion, entre 13h55 et 14h17.

Cette souffrance anoxo-ischémique est en rapport avec une rupture utérine qui est survenue entre 13h20 et 13h45 sans symptomatologie clinique bruyante permettant d'en faire le diagnostic et est en lien direct avec l'état neurologique présenté par l'enfant.

Le tribunal a entériné les conclusions des experts aux termes desquelles ce retard d'extraction avait entraîné une perte de chance pour Marie de naître sans séquelle évaluée à 70%.

Sur les préjudices de l'enfant

La Cour d'appel a  :

  • Dit que la Medical Insurance Compagny Limited doit sa garantie à hauteur du plafond de huit millions d'euros.
  • Fixé à la somme de 16 955,88 euros les frais divers,
  • Fixé à la somme de 1748977,54 euros la tierce personne,
  • Fixé à la somme de 21 000 euros le préjudice esthétique temporaire,
  • Fixé à la somme de 20 000 euros les frais de véhicule adapté.
  • Condamné in solidum M. V. et la Medical Insurance Compagny Limited à payer les sommes précitées à M et Mme C. en qualité de représentants légaux de leur fille Marie C..
  • Condamné in solidum M. V. et la Medical Insurance Compagny Limited à payer à Mme C. la somme de 42 000 euros en réparation de son préjudice moral. Condamné in solidum M. V. et la Medical Insurance Compagny Limited à payer à M. Rémy C. la somme de 35 000 euros en réparation de son préjudice moral.
  • Condamné in solidum M. V. et la Medical Insurance Compagny Limited à payer à la CPAM du Maine-et Loire la somme totale de 357 808,73 euros dont celle de 356 873,38 euros s'imputant sur le poste "dépenses de santé" avant consolidation, et celle de 935,35 euros s'imputant sur le poste "frais divers".
  • Dit que la somme de 51 265,97 euros produira intérêts à compter du 12 septembre 2012 et le surplus à compter du 13 janvier 2020.


Cour d'appel, Versailles, 3e chambre, 11 Mars 2021 - n° 19/01185